Avec un brin de culture manga, difficile de ne pas connaître Berserk, série culte ultra violente qui base son succès sur des monstres, du sexe et de la noirceur bien intense. Une pointure de la dark fantasy qui passe au mixeur pour accoucher d'une des oeuvres les plus violentes de sa catégorie. Je n'ai pas encore pu goûter à la série, en revanche, un groupe de 3 OAV intitulés Berserk, l'âge d'or, sont passés à ma portée. Et quelle bonne petite claque !
L'histoire : Gutz, mercenaire solitaire sillonnant les routes d'un monde moyenâgeux, se retrouve enrôlé par la compagnie du faucon, groupe de mercenaires menés par Griffith, roturier passé maître dans l'art du sabre. En possession d'un artefact appelé le Béhélit, il a pour projet d'être anobli et de fonder son propre royaume. Séduit par le rêve de son employeur, il décide de participer à toutes ses batailles.
Berserk, l'âge d'or est découpé en trois parties de longueurs inégales (1h15, 1h25 et 1h45), découpées d'une façon plutôt intelligentes car elles respectent toutes une gradation en termes de violence et d'enjeux qui les rendent assez fluides, et constamment dans la relance. Commençant sur des bases relativement classiques, le style berserk s'impose vite au cours des combats, qui se révèlent bien chorégraphiés et d'une intensité rare (les seuls combats moyenâgeux atteignant cette sauvagerie sont le méconnu Le sang des templiers ou le Jeanne d'Arc de Luc Besson). De quoi poser une certaine intensité et assurer le spectacle. Les enjeux du premier animé sont relativement simples, probablement pour ne pas encore trop dépayser le public et l'inviter à poursuivre son aventure. En posant la collaboration entre Gutz et Griffith comme un code de mercenaire peu à peu mêlé à une certaine forme d'amitié (plutôt d'attraction par idéalisme), la partie donne une base plutôt solide au début de l'aventure (et en nous ralliant à la cause de Griffith, autant pour son idéalisme que pour son charisme magnétique (le personnage semble presque féminin dans les traits et la voix, ambivalence sans cesse entretenue par l'admiration que tout le monde lui porte). Cette partie pose quelques enjeux politiques qui montrent l'ascension de la troupe du faucon au service d'un des royaumes de la région, ainsi que les jalousies des autres nobles et chefs militaires qui sentent monter la concurrence, d'autant plus agaçante qu'elle vient du monde des paysans et autre plèbe rampante. Seul la séquence d'affrontement avec un démon et la prédiction de ce dernier (en lien avec le Béhélit) donne quelques indices, et en tout cas une petite motivation pour poursuivre la saga. La seconde partie poursuit directement sur les bases de son prédécesseur, mais elle a le bon goût de faire croitre les enjeux à vitesse grand V. Batailles toujours plus impressionnantes, combats gores qui se lâchent, l'avancée inexorable des faucons semble être favorisée par les Eléments. A moins que d'autres forces invisibles soient elles aussi à l'oeuvre. La dimension fantastique de l'univers de Berserk disparaît presque dans cette partie centrale, éludée par les affrontements tribaux du siège de la grande forteresse de Doldrey, place forte imprenable et porte d'entrée dans la noblesse pour Griffith si la victoire est remportée. Je décide de ne pas spoiler l'issue de la bataille, mais c'est à partir d'elle que les choses se corsent, et que l'aventure prend un revirement plutôt méchant, très glauque en fait, laissant le champ libre à la troisième partie qu'il est convenu d'appeler un put*in de climax ! On est déjà impatient d'enchaîner à la fin de la seconde partie, la troisième se pose immédiatement comme un enfer pour nos personnages, s'ouvrant sur une attaque dévastatrice d'assassins ninja avec tout ce qu'il faut de gore pour mettre de la pression. Difficile d'en dire davantage sans spoiler la seconde partie, mais question noirceur, plusieurs personnages se mettent à prendre très cher, et le fantastique revient sans prévenir à la charge (lors d'une séquence déjà intense émotionnellement, pour nous projeter carrément dans une dimension occulte et se livrer à une véritable orgie de violence. Il est vraiment très rare de trouver des films qui se concluent en apothéose, qui placent nos personnages dans des situations critiques à ce point, qui poussent le désespoir aussi loin, la folie aussi, pour certain. Et au point culminant, qui se transforment carrément en clone d'Urotsukidoji ! On savait que Berserk contenait du sexe et de la violence, mais si ce premier aspect avait été éludé, la censure vole en éclat. Et un tel revirement forge véritablement l'étoffe de Berserk, puisqu'il s'agit d'une préquelle préparant le terrain, et s'achevant à l'exact début de la série des mangas. Pas de grandes surprises pour les fans dont, mais les néophytes y trouveront un divertissement intense, sorte de remake de La chair et le sang qui rajoute une dose de fantastique pour s'assurer de sa noirceur. Un sacré projet, vendu beaucoup trop cher par les éditeurs dvds (bandes de voleurs !), mais qui a le mérite d'impressionner.
2013
de Toshiyuki Kubooka
avec Takahiro Sakurai, Rikiya Koyama